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Scientific Woman of the Week - Emmy Noether

Publié le 10 juillet 2023 Mis à jour le 4 décembre 2024

La mathématicienne Emmy Noether (1882-1935) a apporté des contributions fondamentales à deux domaines distincts : l'algèbre et la physique mathématique. Ses idées et ses résultats sont constamment utilisés aujourd'hui.

Emmy Noether nait en 1882 en Allemagne dans une famille juive. Elle se tourne dans un premier temps vers des études de langues, lui permettant d'enseigner le français et l'anglais dans des écoles de filles. Heureusement, un changement de règlement sur les études ouvertes aux filles lui permet d'étudier les mathématiques aux universités d'Erlangen et de Göttingen, deux centres d'excellence mathématique à ce moment. Elle doit toutefois demander à chaque professeur l'autorisation de passer l'examen.

Elle est diplômée en 1903 et défend sa thèse de doctorat en 1907.

De 1907 à 1915, elle est enseignante bénévole à Erlangen, la loi ne permettant pas d'engager des assistantes féminines rémunérées.  Elle commence alors ses recherches en algèbre. Mais en 1915 elle est invitée à Göttingen par David Hilbert et Felix Klein. En juin de cette année, Albert Einstein y fait une série d'exposés sur ce qui sera bientôt la relativité générale.

En mécanique classique, le théorème de la conservation de l'énergie découle facilement des équations du problème, mais ce n'est pas le cas en relativité générale et la question va être discutée par Einstein et les mathématiciens de Göttingen.

En 1916, en réponse à une lettre d'Hilbert, Einstein écrit  : Dans votre article, tout m'est compréhensible, à l'exception du théorème de l'énergie. Il suffirait évidemment que vous chargiez Mlle Noether de me l'expliquer.

En 1918, Emmy Noether publie l'article Invariante Variationsprobleme dans lequel elle démontre qu'à chaque symétrie du lagrangien d'un problème physique est associée une loi de conservation, c'est-à-dire qu’une quantité physique est automatiquement constante. Elle démontre également la réciproque. Il faut souligner que son résultat s'applique non seulement à la mécanique classique et la relativité générale, mais à de nombreux problèmes de physique qui n'existaient pas à l'époque. D'innombrables travaux actuels en physique utilisent le "théorème de Noether" qui est devenu une part indispensable de la physique moderne. Einstein l’appelle « un monument de la pensée mathématique ».

Elle reprend ensuite ses travaux d'algèbre. Non seulement on lui doit une série de notions (anneau local, module noetherien, domaine d'intégrité...) et de théorèmes, mais on lui doit surtout une révolution dans la pratique de l'algèbre, qu'elle développe dans le cadre abstrait étudié aujourd'hui. Pour le mathématicien Nicolas Bourbaki (en fait un groupe de mathématiciens français) son travail de 1929 est "un des piliers de l'algèbre linéaire moderne", et le mathématicien Irving Kaplansky l'appelle "la mère de l'algèbre moderne"

Son influence s'opère par ses articles, ses conférences et par son influence personnelle sur ses élèves, collègues et visiteurs. On connait son impact sur le développement de la "topologie algébrique", alors qu'elle n'a écrit aucun article sur le sujet – elle a informellement donné ses idées à des spécialistes  du sujet, leur laissant le privilège de les publier.

Malheureusement, les lois de l'époque entravent le développement de sa carrière. Malgré le soutien d'Hilbert (et son célèbre argument : « Je ne vois pas pourquoi le sexe de la candidate serait un argument contre son admission comme Privatdozen (professeur agrégé). Après tout, nous sommes une université, pas des bains publics »), elle doit attendre 1919 pour présenter son "habilitation", qui lui donne le droit d’enseigner, mais en n'étant rémunérée que par les étudiants inscrits à ses cours. De 1922 à 1933, elle est nommée "professeur extraordinaire hors cadre", avec un salaire à peine plus élevé.

En 1933, les lois racistes d'Hitler chassent de la fonction publique, et donc des universités, toute personne juive. Comme de nombreux savants, Emmy Noether émigre aux Etats-Unis et elle est nommée professeur au Bryn Mawr College, institution de prestige principalement centrée sur l’enseignement et réservée aux jeunes filles. Heureusement, l'Institute for Advanced Studies de Princeton n'est pas loin, et elle est autorisée à y organiser un séminaire de recherche hebdomadaire.

Hélas, en 1935, elle meurt à l'âge de 53 ans, à la suite d’une opération chirurgicale.


Crédits photo : Wikicommons
Date(s)
du 10 juillet 2023 au 17 juillet 2023